Je suis candidat aux élections du Conseil Consulaire de la troisième circonscription des Etats-Unis qui comprend le Texas, la Louisiane, l'Oklahoma et l'Arkansas. Je m'explique.
Il s'agit d'un nouveau type d'élections. Nous avons déjà des sénateurs de Français de l'Etranger au nombre de 12, mais ils sont élus globalement et ne peuvent donc consacrer que très peu de temps à chaque circonscription de notre diaspora mondiale. Nous avons aussi des députés qui comme les sénateurs siègent à Paris ; dans le cas du nôtre, Frédéric Lefebvre, parachuté par l'UMP en 2013 après l'invalidation de l'élection de Corinne Narassiguin élue en 2012, ce député ne montre guère le bout de son nez chez nous et ne communique jamais non plus sauf en période de campagne. Son secrétariat a mis six mois à répondre à un message que je lui avais adressé sur Facebook lui demandant (justement...) s'il comptait nous tenir au courant de manière aussi pressante après son élection que pendant sa campagne. CQFD.
Le Conseil Consulaire comprendra dans notre circonscription, où environ 10.000 citoyens français sont immatriulés au Consulat et inscrits sur la liste électorale, 4 conseillers élus à la proportionnelle à un seul tour (avec répartition des sièges suivant la règle de la plus forte moyenne). Le Consul Général devra réunir ces conseillers au moins deux fois par an dans un but purement consultatif, mais ils participeront aussi à l'élection des sénateurs, donc ils pourront avoir une influence sur l'ensemble de la politique française. Ce système étant nouveau et l'influence de ces conseillers dépendant à la fois de la bonne volonté du Consul, du niveau d'activité des élus mêmes, et de l'attention que leur porteront les résidents français des états concernés, son efficacité réelle au niveau régional reste à démontrer. Pourtant, comme «la démocratie ne s'use que quand on ne s'en sert pas» (contrairement aux bonnes piles électriques) il est juste puisqu'un tel système est mis en place de tenter sincèrement de le faire fonctionner.
Pour cela il faut des électeurs, et l'on peut espérer qu'outre la possibilité de voter en ligne, la coïncidence de cette élection consulaire avec l'élection des députés européens le 24 mai incite à voter pour la première certaines personnes venues dans les bureaux de vote pour la seconde. Mais il faut aussi des candidats.
On savait dès février que l'UMP allait présenter une liste, sous l'étiquette de l'Union des Français de l'Etranger (UFE) ainsi que M. Damien Régnard, délégué depuis 2009 à l'Assemblée des Français de l'Etranger (AFE) que le Conseil Consulaire va remplacer, candidat malchanceux aux législatives de 2013 après être entré en dissidence de l'UMP pour s'être vu refuser l'investiture du parti (voir plus haut la référence au parachutage de M. Lefebvre). Il s'est alors constitué un rassemblement de gens de gauche pour présenter à nos concitoyens une alternative à ces listes—une liste que nous avons donc appelée «Pour une alternative à gauche», menée par Fabrice Raud et qui rassemble toutes les tendances de gauche sans être affiliée à un parti politique spécifique.
Alors pourquoi répondre «présent» quand on m'a demandé si je voulais bien me joindre à cet effort ?
Premièrement—et c'est la raison la moins rationnelle ou convaincante—parce que j'ai du mal à dire non quand on me demande de l'aide et que la cause en question m'est sympathique.
Deuxièmement pour une raison quasi-morale, au sens des impératifs catégoriques de Kant : si tout le monde se défilait la notion de démocratie perdrait son sens.
Troisièmement enfin parce qu'il me paraît impossible de laisser élire quatre conseillers représentant tous les forces de la réaction homophobe illustrée par la prétendue «Manif pour tous»—c'est-à-dire en réalité la «Manif contre certains» de 2013—qu'ils ont tous clairement soutenue au point d'aller manifester devant le Consulat comme l'a fait personnellement M. Régnard pour protester contre l'égalité de l'accès au statut du mariage.
Supposons en effet que les quatre élus proviennent tous des listes UFE-UMP et Régnard (cette liste est tellement égocentrique qu'on ne peut l'appeler que comme cela) et que mon mari et moi rencontrions auprès de l'administration française un problème administratif ou juridique pour lequel une assistance de nous nouveaux conseillers soit nécessaire. Quelle confiance puis-je avoir dans la représentation ou le soutien que pourraient m'accorder des conseillers qui se sont battus pour nous renier les droits sur lesquels s'appuierait cette démarche ? Non seulement je n'ai aucune confiance en leur action potentielle mais j'aurais même grand mal à ne pas les soupçonner d'œuvrer, au moins par inaction, pour que le résultat de ma démarche soit conforme à leurs préjugés.
Il est donc indispendable pour que nous soyons tous représentés efficacement et équitablement par ces conseillers, pour que leur action de risque pas d'ignorer ou de bafouer la loi de la République, et pour que notre égalité et notre diversité soient respectées par le Conseil Consulaire de notre circonscription, que le 24 mai—ou par Internet entre le 14 et le 20 inclus—un ou plusieurs candidats de la liste «Pour une alternative à gauche» soient élus. Et c'est donc pour cela que j'ai accepté d'en faire partie et que je vous invite à répondre «présents» à votre tour et à voter pour nous.